Mgr Schneider : « Il faut être honnête, il y a des dangers intrinsèques à l’islam »

Mgr Schneider, l’évêque auxiliaire de l’archidiocèse catholique d’Astana au Kazakhstan, revient longuement avec Boulevard Voltaire sur le catholicisme en France, la crise sociale et spirituelle que vit notre pays et livre son analyse de la montée en puissance de l’islam.

Rassemblement national: Zéro + Zéro = Zéro

Neuf années de dédiabolisation. Et moi, et moi, et moi… Une tribune libre de Jean Messiha.


Les Français ont accueilli qui indifférents, qui goguenards, qui atterrés, les affligeants chiffres de participation aux élections régionales et départementales. Ils sont indéniablement choquants. Notre pays est une démocratie. Une démocratie sans votants n’en est plus une, car c’est alors une infime minorité de citoyens qui choisit pour tout le monde.

Nous avons connu dans la première moitié du 19ème siècle le suffrage censitaire qui accordait le droit de vote à une poignée d’électeurs suffisamment riches pour payer l’impôt. Il fut remplacé par le suffrage universel. Mais avec la désertion des urnes par une grande majorité d’électeurs, ce sont à nouveau des citoyens très minoritaires qui déterminent le sort du pays. Et c’est insupportable.

Ceci étant posé, l’enseignement le plus frappant de ce simulacre d’élection c’est bien le collapsus du Rassemblement national. 

Nous eûmes la débâcle combinée de 2017, marquée par les 33% au deuxième tour de la présidentielle (malgré des sondages à 42% juste avant l’élection), et des huit malheureux députés élus à l’Assemblée Nationale (sur 577), alors que l’on en espérait 80. Il n’aura juste manqué qu’un zéro… Huit députés, chiffre inimaginable pour un parti dont la candidate a été finaliste à l’élection élyséenne. En tout cas une première dans l’histoire de la Vème République, et probablement de la République tout court. Premier parti d’opposition de fait, mais incapable de former un groupe parlementaire faute d’élus suffisants. La France Insoumise y est arrivée, elle.   

Marine Le Pen en avait tiré la conclusion qu’il fallait « tout changer du sol au plafond » et avait promis de remettre le mouvement en ordre de marche pour le match retour de 2022. 

Certes, les européennes de juin 2019 furent gagnées. Mais d’extrême-justesse devant un parti présidentiel qui aurait dû être essoré par la longue crise des « gilets jaunes ». D’ailleurs, la totalité des médias n’a pas parlé de victoire du Rassemblement national, se contentant de souligner une place d’ex æquo avec la liste Renaissance conduite par l’inepte LREM Nathalie Loiseau. 

Avec moins de 24% des voix, le RN se trouvait à 10% en dessous de son partenaire italien La Lega de Matteo Salvini qui, contre toute attente, devenait la première force politique du groupe souverainiste au Parlement Européen avec 29 sièges contre 23 pour le RN et en prenait très logiquement la tête.   

Neuf années de « dédiabolisation »

Suivirent les municipales. En 2011, la nouvelle présidente de ce qui était encore le Front National, avait fixé comme objectif central du parti, l’ancrage local. En 2014, premier test. Un peu plus de 1 500 conseillers municipaux élus sur plus de 500 000. Et la conquête de neuf villes dont la plus importante, Fréjus, compte environ 50 000 habitants. Modeste, mais il faut bien commencer quelque part. 

En 2020, brutal retour sur terre. Le « premier parti de France » n’est en mesure de présenter que 411 listes pour les communes de plus de 1 000 habitants.  La France en compte près de 10 000. Neuf années de « dédiabolisation ». Et pourtant une immense réticence à s’afficher au niveau local avec l’étiquette lepéniste, même renommée « Rassemblement ». Au final, les villes RN sont conservées et Perpignan est conquise. Mais le nombre de conseillers municipaux tombe à 827 pour les communes de plus de 1 000 habitants. Moins que ceux du PCF (1 426). Marine Le Pen pointait déjà l’abstention due à la crise sanitaire comme responsable de ce résultat médiocre. Soit. Mais alors comment expliquer que dans exactement le même contexte, le parti Europe-Ecologie-Les Verts fait la conquête de Lyon, Strasbourg, Poitiers, Tours, Bordeaux, Annecy, Besançon et conserve Grenoble (rien que cela !) ? Allié au PS, EELV gère également Paris, Marseille, Montpellier, Nantes, Nancy, Rennes. On peut bien sûr se gausser de leurs bourdes et dénoncer leurs dérives. Mais les résultats sont là. La droite, comme la gauche d’ailleurs, conserve quantité de bastions. Ils sont aux manettes ; le camp national, lui, fait des claquettes.  

Comme il faut avoir des élus locaux pour avoir des sénateurs, le RN se retrouve avec un seul sénateur sur… 348, au terme des élections sénatoriales de fin septembre 2020. Un miracle dû à l’acharnement et à la combativité de Stéphane Ravier, promis à l’éviction du palais du Luxembourg après la perte de sa mairie du 7ème arrondissement. 

Le RN n’a donc qu’un seul et unique sénateur. Vous savez combien le PCF, grand brulé de la politique française, en compte ? Une quinzaine ! 

Ces municipales m’ont ouvert les yeux sur la gestion du Rassemblement national. 

Poussé par quelques cadres du mouvement, je me suis déclaré prêt à porter les couleurs du RN pour la bataille de la capitale de la France. Ma notoriété médiatique avait pris de l’ampleur en raison des innombrables invitations dont je bénéficiais, mon nombre d’abonnés explosait sur les réseaux sociaux. Les militants parisiens me réclamaient. 

Décision de la présidente du RN : ne présenter personne, soutenir un candidat externe inconnu et qui faisait autant envie qu’un sandwich au concombre dans une soirée de rugbymen. Résultat la plus monumentale raclée du RN à Paris depuis des lustres : 1.47% !

Nous voici donc arrivés à la dernière marche avant la présidentielle, les élections combinées régionales et départementales. Des sondages flatteurs, comme à chaque fois. Six régions gagnables, dont une presque garantie : PACA. Et patatras. Les électeurs ne se déplacent pas. Et tout particulièrement ceux du RN. Ils avaient, moyennant un petit effort, la possibilité de placer Marine le Pen en orbite haute pour la présidentielle ; la possibilité, comme disent les politologues, de créer une dynamique. « Nan ! On va à la pêche, on reste chez nous, on bricole, on jardine, on se balade. Mais on ne se déplace pas pour voter pour le RN ». Dingue.

En PACA Thierry Mariani s’est bien battu. Mais au final c’est une défaite sans appel.   

Dans les Hauts-de-France, c’est l’effondrement avec Sébastien Chenu qui fait 24% au premier tour contre 40% en 2015. Et au deuxième tour, les résultats ne s’améliorent pas. Il avait déjà pris une veste monumentale aux municipales à Denain, où la maire socialiste a été réélue dès le premier tour. Qu’à cela ne tienne ! Il est investi tête de liste aux régionales. 

En Ile-de-France, Marine le Pen avait décidé d’envoyer son « dauphin » bardé de son Bac ES pour affronter la « techno » ultra-compétente Valérie Pécresse. 13%, 5 points de moins que Wallerand de Saint-Just en 2015 au premier tour et moins de 11% au deuxième. Qui aurait cru possible de faire bien pire que le cruchon à qui le parti doit sa déliquescence à Paris ? Difficile, par ailleurs, de mettre ce résultat sur le dos du remplacement de peuple car l’abstention la plus forte a été précisément enregistrée dans les départements où la proportion d’immigrés est la plus forte, Seine Saint-Denis en tête.     

En Auvergne-Rhône-Alpes, le score très honorable de 2015 (25%) est divisé par deux. 

En Grand-Est, où Florian Philippot avait dépassé les 36% en 2015, le RN se retrouve à 28%.    

En Occitanie, c’est le PS qui est arrivé en tête au premier tour, se payant le luxe d’augmenter son score de 16% à 40% alors que celui de Marine Le Pen chute de 9%. Le deuxième tour est un plébiscite pour la présidente socialiste.

La déconfiture est générale

Oh, bien sûr, la République en Marche a pris une « branlée » encore pire. Mais elle et son champion ou inversement avaient quand même réussi en 2017 à ravir l’Élysée et 308 sièges à l’Assemblée nationale. Pas mal pour un monsieur inconnu trois ans avant son élection et un parti créé en avril 2016. Il y une différence entre décrocher la médaille d’or et patauger ensuite, et patauger tout le temps. 

Dimanche 27 juin, au soir du deuxième tour, le bilan du RN pour cette double élection territoriale est clair : ZÉRO + ZÉRO = ZERO. Car ce que nous a caché le buzz autour des régionales, c’est une bérézina pire encore. Le RN ne gagne AUCUN conseil départemental sur les plus de 100 que compte notre pays. En tête dans quelques cantons, il n’a été en mesure de remporter une majorité départementale nulle part. Effarant ! D’autant que cette collectivité est celle que le camp national privilégie et à juste titre car elle est à la fois proche des administrés et héritière de la construction historique de la République. Un petit incident pour l’anecdote. Savez-vous que notre pays a connu 20 élections législatives partielles depuis l’été 2017 ? Bilan pour le RN ? Devinez !

On se demande partout : mais pourquoi le peuple RN ne s’est pas déplacé ? Les leaders du parti racontent que leurs électeurs ne s’intéressent pas aux élections locales. Mais c’est faux. En 2015 le parti avait enregistré des gains majeurs grâce à une forte mobilisation ce qui avait permis au FN de s’implanter fortement dans les conseils régionaux et départementaux, créant ainsi une vraie dynamique pour 2017. En 2021, le RN va voir sa représentation locale régresser fortement ce qui va, par ailleurs, accroître ses difficultés financières.     

Je connais le peuple français. Il est courageux. Il est dur à la tâche. Il n’hésitera jamais à prendre une heure ou deux pour aller voter un dimanche. Mais voter pour quoi ? Voter pour qui ? Pour un mouvement qui se « chiraquise »? Qui commence à dire que l’islamisation de masse n’est pas une régression ? Que la CEDH ce n’est pas un problème ? Que l’on va s’accommoder de l’UE sans faire d’histoires ? 

Le RN a préféré faire le choix de la sécurité comme leitmotiv électoral. Il n’y a qu’un malheur : la sécurité n’est que marginalement dans la compétence des régions et des départements… Mais le comble est que la sécurité figurait malgré tout et d’après un sondage réalisé par l’institut Opinion Way quelques jours avant le scrutin régional, au premier rang des préoccupations des électeurs. Cela n’a pas suffit à les faire se déplacer pour le parti qui est supposé l’incarner le mieux.

Un second rôle éternel ?

Mais là n’est peut-être pas le plus grave. Ce peuple, il a besoin de chair et d’âme, de présence, du contact avec celle ou celui qui est censé(e) l’incarner. Moi président du RN, j’aurais arpenté la France en long en large et en travers, levé tôt, couché tard, parlé, écouté, discuté, bu un coup, blagué et compati avec cette France qui souffre et espère tant. Je l’ai tellement fait. Je n’aurais pas fait des apparitions éclairs, des visites d’une petite heure, souvent sur un marché, une conférence de presse vite torchée, un petit tour chez un agriculteur et zou on reprend vite le train pour Paris. Je ne me serais pas uniquement montré dans des bourgs ou des hameaux bien tranquilles où il n’y a pas de risque de face-à-face avec des adversaires qui vous chahutent et qu’il faut savoir affronter plutôt qu’éviter. Bon sang, la France c’est aussi les villes : 50% des Français vivent dans une commune de plus de 10 000 habitants !

Mais au-delà des choix de candidats, des thèmes et du type de campagne, il y a en politique, et tout particulièrement dans un mouvement populaire, l’incarnation. L’incarnation : tout est là. C’est un subtil mélange de charisme, de compétence, de sacrifices, de travail acharné et il faut le dire de chance. Et ça, ça ne s’invente pas. Pas plus que ça ne s’acquiert. On l’a ou on ne l’a pas. Pour réussir cette rencontre magique avec le peuple il faut savoir parler à ses tripes, à son cœur et à son cerveau. Chacun des présidents de la Vème ont eu, à des degrés divers, ce don. Même le bien mièvre François Hollande a eu en 2012 ce coup de génie de se poser en « ennemi de la finance », dans un contexte qui s’y prêtait parfaitement, tout en assénant cette redoutable anaphore « moi président » qui a enseveli Sarkozy lors de leur débat. Bref, il faut être « bon ». Mais pas seulement. Pour être la ou le meilleur, il faut s’entourer des meilleurs. Car c’est à leur contact que l’on s’élève… à condition de les écouter et de les lire. S’entourer de beaucoup de médiocres, qui ont le mérite d’être fidèles et flatteurs, pour se grandir est une erreur capitale. Car ce faisant, on cumule le manque d’émulation, de remise en cause et on n’inspire pas confiance à un peuple qui sait qu’un président est un chef d’orchestre.                               

Marine Le Pen a pris les rênes du parti il y a 10 ans. 10 ans après c’est un parti financièrement exsangue. Je lisais il y a quelques jours que LREM venait d’acheter un siège de 2.800 m2 dans Paris pour 35 millions d’euros. Contraste ! 10 ans après, la présidente du Rassemblement national n’a pas tout à fait tout raté. Mais elle n’a rien réussi vraiment. Elle a solidement installé le RN et elle-même sur la scène politique française en tant que figurant, second rôle et parfois tête d’affiche. Mais jamais comme producteur, scénariste, réalisateur et metteur en scène. 

Elle a gagné la bataille de certaines idées. Mais n’a jamais convaincu les Français qu’elle et son équipe étaient capables de gouverner une région ou un simple département. « Vous n’avez jamais voulu me confier ne serait-ce que la Lozère. Mais je vous demande de me confier la France ». Voilà ce qui pourrait être le slogan de 2022. La présidente du RN a concédé vendredi dernier sur France Info qu’« il faudra récréer une dynamique » pour la présidentielle. Elle a une certaine habitude des montagnes russes. Mais cette fois-ci le chariot a-t-il encore assez de puissance pour remonter une énième pente ? 

« Vous réglez vos comptes avec elle », va-t-on me reprocher. Pas du tout. Je ne règle pas des comptes. Je FAIS les comptes. Qui suis-je pour me le permettre ? En quittant le RN, à regrets, j’ai fondé avec une petite équipe de fidèles ultra-compétents, un think tank qui en sept mois a réuni près de 2000 adhérents, et une jolie brochette d’experts qui m’apportent idées et propositions. Les comptes de mes réseaux sociaux connaissent une croissance exponentielle et il n’est pas de jour où dans les rues, partout en France, des femmes et des hommes de tous âges, de toutes origines et de toutes conditions me saluent, m’encouragent et me remercient. Alors oui, à mon modeste niveau, je crois pouvoir donner un avis sur une personnalité qui a reçue en héritage une organisation solide et a bénéficié du sens de l’histoire.     

J’ai beaucoup rencontré à travers le pays ces militants, adhérents électeurs du RN qui se battent pour que la France reste la France. Et franchement, ils méritent mieux. En fait c’est toute la France qui mérite mieux que ce qu’est le Rassemblement national aujourd’hui. Ce mouvement, allié à d’autres, porte en lui l’espoir d’un avenir meilleur. Mais encore faut-il qu’il soit dirigé par les meilleurs. Que faire alors ? Encore un peu de patience. On en reparle très bientôt.

Source : Jean Messiha pour Causeur

Ou envoyer nos racailles ?

Les prisons sont pleines, on ne sait plus où envoyer les délinquants.

Gardons les places de prison et le budget de fonctionnement pour nos compatriotes qui n’ont pas d’autre nationalité.

Envoyons nos délinquants multirécidivistes, tous ceux qui sont étrangers ou qui sont bi ou trinationaux (après leur avoir retiré la nationalité française) chez nos amis papous.

Prévenus, ils les attendent avec impatience, pour agrémenter leurs parties de chasse et leur menu.

Le Premier Parti de France

Les plus nombreux à ne pas voter, sont à l’évidence les abstentionnistes. On peut dire qu’ils représentent à eux seuls l’équivalent du plus grand parti de France.

Le résultat de ces élections n’est pas brillant, il témoigne du manque d’intérêt de la population pour la  représentation  d’une démocratie  qui n’existe plus.

Si le LREM a fait un score très bas, le RN ne fait guère mieux. On peut se poser des questions sur les efforts de la dirigeante du RN pour abandonner les fondamentaux de son parti.

La sanction s’est faite dans les urnes. Les gens, qui jusque là, votaient régulièrement pour des idées différentes des autres formations politiques, ne se retrouvent plus dans le langage à l’eau tiède de MLP, qui rejoint celui d’une droite bien pensante.

Ils attendent d’elle un discours sans concessions, alors qu’elle ne cesse de donner des gages de bonne conduite à ses adversaires politiques.

Il est certain, que l’abstention est une erreur de jugement, mais à qui la faute ? Elle a voulu éviter à tout prix la diabolisation, ce qui n’a servi à rien. Beaucoup trop de rétropédalages ont été faits, sans le moindre bénéfice pour sa popularité. Maintien dans l’OTAN, dans l’euro, dans l’UE, rien sur la vaccination, plus question de parler de souverainisme et d’identité. L’Islam décrit comme compatible avec la démocratie et la République. Rien sur le remplacement de population par une immigration toujours plus nombreuse, ni sur le PMA, le libertarisme sexuel et la politique familiale. Elle est toujours décrite comme chef de file d’un parti, considéré à tort comme anti républicain.

Ce nom de Le PEN reste pour sa réputation un handicap rédhibitoire.  Dès lors, il serait préférable qu’elle en tire les conclusions qui s’imposent.

Le ex-FN représente des millions d’électeurs. Si sa présidente veut vraiment qu’il soit en mesure d’être en position présidentielle, elle ne peut que se mettre en marge et laisser sa place à une nouvelle personnalité.

Quelqu’un de solide dans sa conviction et qui tienne le même discours de fermeté que Zemmour, de Villiers, Jean Messiha, Frédéric Poisson et d’autres, comme Philippot ou Dupont-d’Aignan.

La présidente du RN, ne représente plus les idées de souverainisme et d’identité nationale qui étaient celles de son père. Elle s’est disqualifiée, par son changement de programme et sa purge de vieux militants qui avaient pourtant beaucoup donné de leur personne pour faire avancer ce mouvement.

A l’heure actuelle, il ne reste que peu de temps jusqu’aux présidentielles qui seront décisives pour l’avenir du pays et pour le sortir de la décadence ou pour le laisser aller à la dérive. La lutte n’est plus entre gauche et droite, mais entre souverainistes et mondialistes.

La gauche historique, celle des idées de Jaurès, n’est pas « progressiste » et pas davantage mondialiste. Elle n’approuve pas les idées folles, que d’autres appellent lucifériennes et qui sont la marque d’un progrés qui marche sur la tête.

Pour éliminer le freluquet de l’Elysée, il faut que tous les gens de bonne volonté, qu’ils se réclament de la gauche ou de la droite oublient leurs petits différents et se rassemblent sous la bannière du patriotisme.

Les abstentionnistes n’attendent qu’un discours convaincant pour se déplacer vers les urnes. Quel sera celui, celle, ou ceux qui seront leur parler ?

Il s’agit en priorité de ne pas tomber dans le scénario stérile qui opposerait le méchant roquet Xavier Bertrand (celui qui passe son temps à insulter le RN) à Macron le destructeur de la France traditionnelle.

Deux personnages qui pensent pareil, qui ont la même détestation des idées identitaires et qui travaillent pour le triomphe de la grande finance mondialisée.

Alors entre la peste et le choléra, à quoi bon se déplacer pour aller voter ? Les abstentionnistes seront devenus vraiment le premier parti de France.

Clémenceau disait: « Il faut savoir ce que l’on veut. Quand on le sait, il faut avoir le courage de le dire. Quand on le dit, il faut avoir le courage de le faire ».

Onyx

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Les Crimes de Masse sous Staline (1930-1953)

LES DÉPORTATIONS MASSIVES DE PAYSANS DANS LE CADRE DE LA « LIQUIDATION DES KOULAKS EN TANT QUE CLASSE » (1930-1932)****

Le lancement de la collectivisation forcée des campagnes, décidé au Plenum du Comité central du Parti communiste de novembre 1929, s’accompagne de la « liquidation des koulaks en tant que classe » ou « dékoulakisation ». Cette campagne a un double objectif : « extraire » (tel est le terme employé dans les instructions confidentielles) les éléments susceptibles d’opposer une résistance active à la collectivisation forcée des campagnes et « coloniser » les vastes espaces inhospitaliers de la Sibérie, du Grand Nord, de l’Oural et du Kazakhstan. Le premier objectif répond à la vision, clairement exprimée par les bolcheviks dès leur arrivée au pouvoir, selon laquelle la société paysanne, traversée d’antagonismes de classe, recèle des « éléments capitalistes » (koulaks ) irrémédiablement hostiles au régime. Le second objectif s’inscrit dans la mise en oeuvre du 1er Plan quinquennal, lancé peu de temps auparavant (début 1929) qui prévoit le développement d’un certain nombre de régions vides d’hommes, mais riches en ressources naturelles, par une main d’oeuvre pénale ou déportée. La « dékoulakisation » prend donc, pour l’essentiel, la forme d’une expropriation, suivie de déportation, de millions de paysans.

30 janvier 1930 : Résolution du Politburo du parti communiste « Sur les mesures à prendre pour la liquidation des exploitations koulak dans les régions de collectivisation totale ».

Cette résolution attribue à chaque région ou république des « quotas de dékoulakisation » en « 1ère » et « 2e » catégories. Au nombre initial de 60 000, les « koulaks de 1ère catégorie », définis comme des « activistes engagés dans des actions contre-révolutionnaires », doivent être arrêtés et transférés en camp de travail, à l’issue d’un « passage rapide devant une troïka » (juridiction d’exception de la police politique). Il est précisé « qu’à l’encontre des activistes les plus fieffés et endurcis » la peine de mort sera appliquée. Quant aux « koulaks de 2e catégorie », définis comme des « exploiteurs, mais moins activement engagés dans des activités contre-révolutionnaires », et estimés au nombre de 129 000 à 154 000 familles, ils seront expropriés et déportés en famille, sur simple mesure administrative, vers des régions « éloignées » du pays. Privés de leurs droits civiques, les déportés, qualifiés administrativement de « déplacés spéciaux », sont assignés à résidence dans des « villages spéciaux » gérés par l’OGPU (NKVD à partir de 1934).

Début février- fin septembre 1930 : Opérations massives d’arrestation de « koulaks de 1ère catégorie ».

Durant cette période, 284 000 personnes sont arrêtées comme « koulaks de 1ère catégorie », soit près de cinq fois plus que le nombre initialement prévu. Ceci est dû, en partie, à la résistance inattendue opposée par un certain nombre de paysans -et de non-paysans- à la collectivisation. À peine 44% des personnes arrêtées sont des paysans ; les autres sont membres du clergé, petits commerçants, anciens fonctionnaires tsaristes, ex-propriétaires fonciers, instituteurs ou autres représentants de « l’intelligentsia rurale » ayant, par le passé, été proches du parti socialiste-révolutionnaire. (Source : rapports du Département secret-opérationnel de l’OGPU, in V.P.Danilov(dir), Sovetskaia derevnia glazami VCK,OGPU,NKVD, Moskva, Rosspen, 2003, vol III/1, 1930-1931).

Ces contingents sont envoyés dans les camps de travail du Goulag. Environ 20 000 personnes sont, au cours de l’année 1930, condamnées à la peine capitale par les troïki de l’OGPU. (Source : GARF, 9401/1/4157/201).

Début février-fin mai 1930 : Première vague de déportations de « koulaks de 2e catégorie ».

Durant ces quatre mois, 560 000 personnes (115 000 familles) sont arrêtées, expropriées et déportées, principalement des grandes régions agricoles les plus riches (et où la résistance à la collectivisation forcée a été la plus forte) -l’Ukraine, le Kouban, la Basse et la Moyenne Volga, la région centrale des Terres noires- vers le nord de la Russie (province d’Arkhangelsk), l’Oural et la Sibérie occidentale. Pour mener à bien ces déportations, une véritable logistique militaire,mobilisant 280 convois ferroviaires et des milliers d’hommes des unités spéciales de l’OGPU, est déployée. (Source : rapports du Département des transports de l’OGPU, in V.P.Danilov, op.cit ). Cette première vague de déportation est marquée par une absence totale de coordination entre les opérations militarisées de déportation menées par l’OGPU et l’installation des déportés, laissée à l’initiative d’autorités locales débordées. Elle débouche souvent sur une « déportation-abandon » sans précédent : les déportés sont abandonnés à leur sort, installés dans des baraquements provisoires le long des voies de chemins de fer, ou laissés dans la steppe ou la taïga. La mortalité explose, notamment parmi les enfants et les vieillards. Environ 15% des déportés meurent dans les mois suivant leur déportation. Au milieu de ce chaos meurtrier, une proportion importante des déportés (entre 15 et 20%) réussit à s’enfuir. (Sources : Iouri Poliakov, dir, Naselenie Rossii v XX veke, tom.1, Moskva, Rosspen, 2000, p. 278 sq ; documents des administrations régionales de l’OGPU, in V.P.Danilov, dir, op.cit ).

Fin septembre-octobre 1930 : Deuxième vague de déportation de « koulaks de 2e catégorie »

Dans le contexte tendu de l’été 1930 -huit millions de foyers paysans ont quitté les kolkhozes après la publication, début mars, du fameux article de Staline condamnant « le vertige du succès » et rejetant sur les autorités locales les « abus » de la collectivisation, les grandes opérations de « dékoulakisation » ont été interrompues fin mai. Elles ne reprennent que ponctuellement fin septembre 1930, une fois que les récoltes ont été engrangées. Elles concernent quelque 16 500 familles (environ 60 000 personnes) déportées des districts frontaliers de Biélorussie et d’Ukraines occidentale, limitrophes de la Pologne, considérés comme stratégiques et qui avaient été, au printemps, le théâtre de révoltes paysannes de grande ampleur. (Source : télégramme de Messing à Balitskii et Rappoport, 22 septembre 1930, in V.P.Danilov, dir, op.cit ).

Les déportés sont répartis entre le Kazakhstan et l’Oural.

Mai-septembre 1931 : Troisième vague de déportation de « koulaks de 2e catégorie »

Au début de 1931, le Politburo et la direction de l’OGPU décident de lancer une nouvelle vague de déportation, dans une conjoncture considérée comme favorable. La récolte de 1930 a été excellente, la campagne de collecte a permis à l’État d’engranger plus de 21 millions de tonnes de céréales (soit deux fois plus qu’en 1927-1928, à la veille de la collectivisation forcée), plusieurs millions de foyers paysans ont rejoint, sous la contrainte, les kolkhozes au cours des derniers mois de l’année 1930. Le 20 février 1931, le Politburo adopte un nouveau plan de déportation, particulièrement ambitieux : il s’agit de déporter, à partir du printemps 1931, entre 200 et 300 000 familles, principalement vers le Kazakhstan méridional. (Source : Résolution du Politburo du 20 février 1931, in V.P.Danilov, dir, Tragedia sovetskoi derevni, vol III (1930-1933), Moskva, Rosspen, 2003, p. 90).

Le 11 mars 1931, le Politburo met en place une commission spéciale, dirigée par A. Andreiev, vice-président du Conseil des Commissaires du peuple, chargée de superviser et de coordonner l’ensemble des opérations de déportation et d’organiser une « gestion rationnelle et efficace des déplacés spéciaux afin d’éviter que se reproduise l’effroyable gâchis de main d’oeuvre et le désordre dans l’exploitation de celle-ci constatés lors des précédentes opérations de déportation ». Le 15 mai 1931, la Commission Andreiev transfère à l’OGPU l’ensemble de la direction économique, administrative et organisationnelle des « peuplements spéciaux ». Au total, 1 244 000 personnes (265 000 familles) sont déportées au cours de cette « troisième vague » de « dékoulakisation », principalement vers l’Oural, la Sibérie occidentale, la Région Nord et le Kazakhstan. Comme en 1930, les pertes humaines sont très élevées. Au 1er janvier 1932, lors du premier pointage général des « déplacés spéciaux », on ne recense que 1 317 000 présents sur les 1 804 000 déportés en 1930-1931, soit une perte de près d’un demi-million d’individus en deux ans. On estime que cette perte se partage pour moitié entre fuites et décès. (Sources : Bilan des opérations de dékoulakisation au 30 septembre 1931, in V.P.Danilov, dir, Sovetskaia…, op.cit, vol. III/1, p.771 ; I.Poliakov, dir, op.cit, p. 279-280).

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DÉPORTATIONS DE COMMUNAUTÉS PAYSANNES D’UKRAINE ET DU KOUBAN DANS LE CADRE DES « CAMPAGNES DE COLLECTE » DE L’AUTOMNE 1932****

Dans le contexte particulièrement tendu de la « campagne de collecte » engagée dans les grandes régions productrices de céréales (Ukraine, Kouban, Basse et Moyenne Volga) à l’automne 1932 pour réaliser le plan d’exportation en cette dernière année du 1er Plan quinquennal, les déportations frappent désormais non plus des familles stigmatisées comme koulaks, mais des communautés paysannes entières accusées de « saboter » la « campagne de collecte ». Ainsi, en novembre-décembre 1932, trois stanitsy (gros bourgs) cosaques du Kouban (Medvedovskaia, Umanskaia, Poltavskaia) sont entièrement vidées de leurs habitants, tous déportés vers la Sibérie, l’Oural et le Kazakhstan (45 600 personnes). Peu après, des soldats démobilisés de l’Armée rouge sont installés, avec leur famille, dans ces stanitsy. Ces déportations collectives (qui n’ont de précédent que la déportation des Cosaques du Terek fin 1920) marquent un tournant majeur entre les opérations de dékoulakisation des années 1930-1931 et les déportations ethniques de communautés entières qui se développent à partir de 1935. (Sources : Terry Martin, op.cit, p.300 ; V.Vassiliev et I.Shapoval, Komandiry Velihogo golodu, Kiiv, Ed. Geneza, 2001, p.119-120).

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LES FAMINES DES ANNÉES 1931-1933***

Depuis le livre pionnier de Robert Conquest, The Harvest of Sorrow, paru en 1986, de nombreux travaux, tant occidentaux que russes, ukrainiens ou kazakhs, ont enfin éclairé, sur la base d’une documentation archivistique profondément renouvelée, les mécanismes ayant généré les terribles famines des années 1931-1933. Malgré quelques divergences dans l’analyse de certains enchaînements et du poids respectif des divers facteurs ayant conduit à ces famines, les historiens s’accordent à reconnaître que ces événements tragiques sont le résultat non de conditions météorologiques mais bien des politiques mises en oeuvre par le régime depuis le début de l’année 1930. Menée contre la volonté de l’immense majorité de la paysannerie, la collectivisation forcée des campagnes a entraîné une chute catastrophique du cheptel et une forte baisse de la production agricole. Elle a surtout été marquée, une fois les mécanismes du marché (qui fonctionnaient tant bien que mal sous la NEP) brisés, par un formidable accroissement des prélèvements d’État sur les récoltes et les produits de l’élevage. Un tel prélèvement prédateur, censé financer, par des exportations massives de produits agricoles, l’industrialisation accélérée du pays, achève de désorganiser le cycle productif. Ces politiques ont été aggravées au Kazakhstan par une sédentarisation des éleveurs nomades et semi-nomades, et en Ukraine, par l’interprétation spécifique développée par Staline, à partir de l’été 1932, de la situation dans cette république fédérée.

C’est donc au Kazakhstan et dans les régions ethniquement ukrainiennes (Ukraine et Kouban) que la famine connaît sa plus grande ampleur, avec toutefois, des spécificités propres.

Début 1931-début 1933 : Famine au Kazakhstan.

Depuis 1930, le Kazakhstan est entraîné, comme le reste de l’URSS, dans la tourmente de la collectivisation forcée et de la « dékoulakisation », auxquelles s’ajoute ici un vaste plan de sédentarisation. Dans un pays d’élevage extensif et de transhumance, l’organisation de kolkhozes et de sovkhozes est censée aussi fixer les éleveurs nomades et semi-nomades. Un vaste plan de développement d’une agriculture céréalière est mis en oeuvre. Toutes ces mesures doivent faire passer les Kazakhs d’une « économie naturelle » à une « économie socialiste », en brisant définitivement les structures claniques qui, selon les responsables communistes, maintiennent les « masses kazakhes » dans l’oppression. La course aux records de collectivisation, la sédentarisation forcée et le triplement des livraisons obligatoires de viande conduisent à une diminution du cheptel, le plus important d’URSS à la fin des années 1920, de 85% en trois ans (1929-1931), entraînant une immense paupérisation de la population kazakhe . Dès l’été 1930, les autorités kazakhes sont alertées, par des rapports confidentiels de l’OGPU, de la montée de « difficultés alimentaires ». Début 1931, Staline est informé, par les autorités consulaires soviétiques en Chine, des migrations massives de Kazakhs vers le Xinjiang. Tout au cours de l’année 1931, l’exode des nomades kazakhs, dépossédés de leurs troupeaux, s’accélère, notamment vers la Sibérie occidentale.Jusqu’à l’été 1932, les dirigeants du parti communiste kazakh ferment les yeux sur les raisons de ces exodes massifs et refusent d’évoquer les « difficultés alimentaires ». La première aide débloquée par Moscou en juillet 1932 est dérisoire -à peine 50 000 tonnes de céréales, soit quelque dix kilos par personne ! Quatre mois plus tard, Staline accuse les communistes kazakhs de « se livrer à un sabotage koulak du plan de livraison de produits agricoles ».

(Source : télégramme de Staline à la direction du parti communiste kazakh, 21 novembre 1932, in Tragedia…, op.cit, vol.III, p. 548-549).

Il est aujourd’hui établi qu’en 1931-1933, la population du Kazakhstan a diminué de 1,7 à 2 millions de personnes. Sur ce nombre, environ 600 000 ont fui définitivement leur région ravagée par la famine ; les autres -entre 1,1 et 1,4 million- sont morts de faim ou d’épidémies. À la fin des années 1920, la population du Kazakhstan était estimée à 6,5 millions de personnes, dont 3,8 millions étaient Kazakhs, dans leur immense majorité des éleveurs menant un mode de vie nomade ou semi-nomade. Ce sont précisément ces éleveurs kazakhs qui ont été les plus massivement frappés par la famine, qui emporta donc environ un tiers de la population autochtone -une proportion sans équivalent dans aucune des régions de l’URSS. (Sources : M.B.Tatimov, M.K.Kozybaev, Z.B.Abylhozin, Golod v Kazakhskoï stepi. Pis’ma trevogi i boli, Alma-Ata, 1991 ; Isabelle Ohayon,Du nomadisme au socialisme. Sédentarisation, collectivisation et acculturation des Kazakhs en URSS, 1928-1945, Paris, Maisonneuve, 2006).

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1932-1933: famine en Ukraine et au Kouban.

La famine ukrainienne présente une forte spécificité sur le fond général des famines soviétiques des années 1931-1933. Celles-ci apparaissent comme des conséquences directes, mais non prévues et non programmées, des politiques d’inspiration idéologique mises en oeuvre depuis fin 1929. En 1931, l’Ukraine, le Kouban et la région centrale des Terres noires sont particulièrement mises à contribution pour livrer leur production à l’État. L’Ukraine, par exemple, est ponctionnée à hauteur de 42% de sa récolte globale, un prélèvement exceptionnel qui achève de désorganiser le cycle productif déjà perturbé par la collectivisation forcée et la dékoulakisation. Pour l’année 1932, le gouvernement soviétique fixe des livraisons obligatoires encore plus élevées (7 millions de tonnes pour l’Ukraine), alors même qu’apparaissent, dès le printemps 1932, les premiers foyers, encore circonscrits, de famine dans les provinces de Kharkov, Kiev, Dniepropetrovsk, Odessa. Jusqu’à l’été 1932, la famine ukrainienne entre dans le schéma général des famines consécutives à la collectivisation forcée. Mais à partir de l’été 1932, elle change de nature, dès lors que Staline élabore une « interprétation nationale de la famine » (Terry Martin). L’opposition au plan de collecte jugé « irréaliste » qui se manifeste à la IIIe Conférence du parti communiste ukrainien (6-10 juillet 1932) ne passe pas inaperçue de Staline. Comme le montre la correspondance, récemment publiée, entre Staline et ses principaux collaborateurs durant l’été 1932, Staline se persuade qu’un vaste front de résistance, allant des simples kolkhoziens aux dirigeants communistes ukrainiens, s’est constitué en Ukraine pour refuser de livrer à l’État les produits agricoles nécessaires à l’approvisionnement des villes et à l’exportation. (Source : Stalin i Kaganovic. Perepiska 1931-1936, Moskva, Rosspen, 2001).

Il décide alors d’utiliser l’arme de la faim pour punir une paysannerie consciente de sa spécificité nationale et qui, forte de cette identité, refuse le « nouveau servage » imposé par le pouvoir central. Staline engage une politique ciblée de répression contre l’Ukraine et le Kouban, peuplé majoritairement d’Ukrainiens. Ses deux plus proches collaborateurs, Viatcheslav Molotov et Lazar Kaganovitch, sont envoyés comme « plénipotentiaires » en Ukraine et au Caucase du nord, avec pour mission de « purger » les organisations communistes locales et de remplir le « plan de collecte ».

Des détachements armés « d’activistes » venus de Russie et des unités de la police politique engagent de véritables actions punitives dans les kolkhozes ukrainiens pour « prendre d’assaut les céréales » par la force, y compris les semences pour la future récolte et les maigres « avances » en nature reçues par les kolkhoziens pour leur travail de l’année. Les villages qui n’ont pas rempli le « plan de collecte » sont « inscrits au tableau noir » : tous les magasins y sont fermés, les importations de produits alimentaires ou manufacturés interdites. Enfin, afin d’éviter un afflux massif des paysans affamés vers les villes et d’empêcher que la nouvelle de la famine, totalement passée sous silence, ne se diffuse, la vente des billets de train est suspendue et des détachements de l’armée et de la police politique déployés autour des zones affamées pour empêcher tout exode. Staline en personne, rédige,le 22 janvier 1933, la circulaire qui ordonne le blocus des campagnes ukrainiennes. Au cours du seul mois de février 1933, 220 000 paysans ukrainiens qui tentent de fuir leur village sont arrêtés par les cordons de troupes de l’OGPU ; 190 000 sont renvoyés chez eux, mesure qui les condamne à une mort certaine ; quant aux autres, ils sont envoyés en camp ou déportés. Pendant que des millions de paysans meurent de faim, le gouvernement soviétique exporte 1 800 000 tonnes de céréales pour honorer les dettes contractées vis-à-vis de l’Allemagne et acheter des machines étrangères qui doivent permettre de mener à bien les plans d’industrialisation accélérée. En cette année 1933, les réserves stratégiques d’État, stockées dans l’éventualité d’une guerre, dépassent trois millions de tonnes. Une quantité plus que suffisante pour sauver des millions d’affamés. Les estimations du nombre de morts par famine en Ukraine et au Kouban oscillent entre quatre millions et quatre millions cinq cent mille. (Sources :Ju.Shapoval, V.Vassiliev, Komandiry velykoho holodu, Kiiv, 2001 ; V.P.Danilov, dir, Tragedia…, op.cit, vol. III).

1932-1933: Famine dans les régions de la Volga.

En dehors de l’Ukraine et du Kouban, d’autres grandes régions productrices de céréales sont frappées par la famine. Il s’agit là de famines plus localisées dues également non pas à des mauvaises conditions météorologiques, mais à des prélèvements tout à fait disproportionnés sur la production des kolkhozes. Les régions les plus affectées sont la Basse et la Moyenne Volga, où l’on constate une surmortalité de 300 à 400 000 personnes durant l’année 1933. (Source : V.Kondrasin, D.Penner, Golod 1932-1933 v sovetskoi derevne, Smara-Penza, 2002).

1933 : Famine dans les « peuplements spéciaux ». (Région Nord, Oural, Sibérie occidentale).

À la suite d’une réduction drastique des « normes de rationnement » allouées par l’administration aux « déplacés spéciaux », disettes et famines deviennent endémiques dans un grand nombre de « peuplements spéciaux » de la Région Nord, de la Carélie, de l’Oural, de Sibérie occidentale. Selon les statistiques centralisées du Département des peuplements spéciaux du Goulag, au cours de l’année 1933, 151 000 décès sont enregistrés, soit un taux de mortalité de 14% (on compte, au 1er janvier 1933, 1 110 000 « déplacés spéciaux ». La plupart des décès, de l’aveu même des autorités, sont dus à une « dystrophie alimentaire ». (Sources :V.Zemskov,op.cit, p.22-26 ; Lynne Viola, « La famine de 1932-1933 en Union Soviétique, Vingtième Siècle. Revue d’Histoire, n°88, octobre-décembre 2005, p. 5-22) )

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1933-1935 : DÉPORTATIONS DES « ÉLÉMENTS SOCIALEMENT NUISIBLES » ET DES « GENS DU PASSÉ » D’UN CERTAIN NOMBRE DE VILLES SOVIÉTIQUES***

Au début de 1933, le gouvernement soviétique lance une vaste campagne de « nettoyage » des principales villes du pays « des éléments superflus, non liés à la production, ainsi que des éléments koulaks, criminels et autres éléments socialement nuisibles ». La police multiplie les rafles de tous ceux qui se sont vu refuser le droit de résider dans les villes « à régime spécial » (Moscou, Leningrad, et une douzaine de villes importantes et relativement bien approvisionnées), aussitôt déportés, sur simple décision administrative, vers la Sibérie et le Kazakhstan. Dans le chaos ambiant, il arrive que les convois de déportés soient débarqués au milieu de nulle part, comme en témoigne l’épisode tragique de quelque 6 000 « éléments socialement nuisibles » expédiés, en avril 1933, de Moscou et de Léningrad vers Tomsk, en Sibérie. Une fois arrivés à destination, les déportés sont envoyés, par péniche, sans vivres ni outils, sur un îlot désert au milieu de l’Ob, où 4 000 d’entre eux meurent de faim et d’épuisement. (Source :Nicolas Werth, L’Ile aux cannibales. 1933, une déportation-abandon en Sibérie, Paris, Perrin, 2006 ). Au cours de l’année 1933, plus de 100 000 « éléments socialement nuisibles » sont déportés des villes « à régime spécial » à l’issue d’une procédure administrative expéditive, soit environ 40% du nombre total (268 000) de l’ensemble des personnes déportées cette année-là (les 60% restants étant, en majorité, des paysans interceptés alors qu’ils tentaient de fuir la famine, ou des kolkhoziens déportés, parfois par villages entiers, pour avoir « saboté le plan de collecte ». (Source : V.N.Zemskov, Spetzposelentsy v SSSR, Moskva, Nauka, 2003, p. 24 sq).

Parmi les opérations de « nettoyage » des villes soviétiques de leurs habitants indésirables, on retiendra celle menée, en février-mars 1935, peu après l’assassinat de S. Kirov (1er décembre 1934).

4 833 « chefs de famille » qualifiés de « gens du passé » (byvsie ljudi )- ex-fonctionnaires et ex-officiers tsaristes, ex-nobles et, d’une manière générale, toute personne ayant appartenu aux élites politiques ou sociales de l’Ancien régime, ainsi que les membres du clergé- au total 11 200 personnes (en comptant les membres des familles) sont expulsés de Leningrad et exilés dans des petites villes provinciales de la région de Volga. Cet exil ne devait être, pour la plupart, que la première étape d’un parcours qui se terminerait tragiquement au moment de la « Grande Terreur » de 1937-1938 par l’envoi en camp ou l’exécution. (Source : V.A.Ivanov, « Operatsia byvsie ljudi v Leningrade, fevral’-mart 1935 », Novyi Casovoï, 1998, n°6-7, p. 118-130).

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1935-1937 : DÉPORTATIONS DE MINORITÉS ETHNIQUES DANS LE CADRE DU « NETTOYAGE » DES ZONES FRONTALIÈRES DE L’URSS***

À partir de 1935, le gouvernement soviétique multiplie les opérations de « nettoyage » des zones frontalières, de plus en plus perçues comme une véritable ligne de front.

En février-mars 1935, dans la région de Leningrad, une première opération se solde par la déportation de quelque 3 500 familles d’origine finlandaise, lettone ou estonienne, envoyées au Kazakhstan, en Sibérie et au Tadjikistan. (Source : Terry Martin, The Affirmative Action Empire. Nations and Nationalism in the Soviet Union, 1923-1939, Cornell University Press, 2001, p. 333sq).

Au même moment, 8 300 familles (41 650 personnes) sont déportées des districts frontaliers des régions de Kiev et de Vinnitsa. Les citoyens soviétiques d’origine polonaise et allemande représentent la majorité des déportés, les autres étant catalogués comme « éléments socialement étrangers ». Dans ces premières opérations, encore limitées et sélectives, le critère ethnique était « panaché » avec des considérations de classe, plus convenues dans la culture politique communiste.

Les opérations de « nettoyage » des zones frontalières sont poursuivies et amplifiées en 1936. En avril-mai 1936, un second contingent de 5 000 familles d’origine finlandaise est déporté de la région de Leningrad. En juin et septembre 1936, 15 000 familles d’origine polonaise et allemande résidant, en Ukraine occidentale, le long de la frontière soviéto-polonaise, sont déportées vers le Kazakhstan.

La déportation la plus massive frappe, en septembre-octobre 1937, l’ensemble de la communauté coréenne installée dans les districts frontaliers de l’Extrême-orient soviétique (régions de Vladivostok, de Khabarovsk, du Birobidjan). Dans la résolution secrète du Comité central du parti communiste, en date du 21 août 1937, cette déportation massive était justifiée par le fait que les Coréens constituaient « un vivier d’espions et de diversionnistes pour les services secrets japonais ». Pour la première fois, la totalité d’une minorité nationale- 172 000 individus- est déportée. Pour mener à bien cette opération dans les délais impartis (deux mois), le NKVD mobilise 124 convois ferroviaires pour transporter jusqu’en Ouzbekistan ou au Kazakhstan les Coréens déportés. (Source : P. Polian, Ne po svoiei vole. Istoria i geografia prinuditel’nyh migracij v SSSR, Moskva, OGI-Memorial, 2001, p. 87-92).

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AOÛT 1937-NOVEMBRE 1938 : ARRESTATIONS ET EXÉCUTIONS DE MASSE DE LA « GRANDE TERREUR »

En seize mois, plus d’un million et demi de personnes sont arrêtées, dont 800 000 sont condamnées à mort, un nombre à peu près équivalent étant condamné à une peine de dix ans de travaux forcés dans les camps du Goulag, par des tribunaux d’exception (troïki –commissions de trois membres », dvoïki –« commission de deux membres », Conférence spéciale, Collège militaire de la Cour suprême). Ces tribunaux d’exception examinaient les dossiers préparés par le NKVD en l’absence de toute défense de l’accusé, en l’absence des accusés eux-mêmes.

Les recherches récentes sur ce moment paroxystique de la répression stalinienne ont infirmé deux idées encore largement répandues, à savoir que les dénonciations émanant de la société auraient permis un « emballement incontrôlé » de la terreur; que les communistes et les cadres du Parti auraient été les principales victimes (thèse développée par Nikita Khrouchtchev dans son « Rapport secret » au XXe congrès du PCUS en février 1956).

En réalité, la « Grande Terreur » fut, pour l’essentiel, le résultat d’opérations répressives de masse secrètes, décidées et planifiées par Staline en personne, assisté de son Commissaire du peuple à l’Intérieur, Nikolaï Iejov, et mises en oeuvre systématiquement par l’immense appareil de la Sécurité d’État. Ces « opérations secrètes de masse » apparaissent comme le point d’aboutissement, radical et meurtrier, de toute une série d’opérations d’ingéniérie sociale engagées depuis le début des années 1930. Ces grandes opérations terroristes secrètes me paraissent devoir être clairement différenciées des purges des élites et des cadres politiques, économiques, militaires et intellectuels menées parallèlement, au terme de procédures extrajudiciaires différentes, répondant à d’autres objectifs et à une autre fonctionnalité politique. Aussi spectaculaire et politiquement significative fût-elle, la face publique de la « Grande Terreur », largement « popularisée » par la « découverte » d’innombrables complots et actes de sabotage, l’arrestation, puis l’exécution, au terme de procès politiques publics à fort « contenu pédagogique », de nombreux cadres communistes, ne représenta qu’une petite fraction de l’ensemble des victimes de 1937-1938 : 40 000 à 50 000 sur un total de 800 000 exécutés. Il est donc erroné de qualifier ce paroxysme exterminateur du stalinisme de « grandes purges », comme continuent à le faire certains historiens. Le terme de « purges » devrait être réservé aux seules purges politiques, récurrentes dans le système soviétique, mais rarement meurtrières.

30 juillet 1937 : Ordre opérationnel secret du NKVD n° 00447 « Sur les opérations de répression des ex-koulaks, criminels et autres éléments contre-révolutionnaires ».

Ces opérations ont pour but « d’éradiquer définitivement» (selon les termes mêmes utilisés par Nikolaï Iejov dans le préambule à l’ordre n° 00447) un large éventail d’ennemis que l’on pourrait qualifier de « traditionnels » pour le régime issu de la révolution bolchevique : sont notamment ciblés les « ex-koulaks rentrés chez eux après avoir purgé leur peine ou échappés de déportation », les « criminels récidivistes », les « anciens membres de partis non-bolcheviques », les « ex-fonctionnaires ou gendarmes tsaristes », les « éléments antisoviétiques ayant servi dans des formations blanches, cosaques ou cléricales », les « membres de sectes ou du clergé se livrant à des activités antisoviétiques ». Chaque région se voit attribuer des quotas d’individus à fusiller et d’individus à interner en camp pour une durée de dix ans, pour un total de 76 000 « éléments en 1ère catégorie » (peine de mort) et 193 000 en « 2e catégorie » (dix ans de camp). Rapidement, une dynamique d’émulation s’enclenche, les responsables régionaux du Parti et du NKVD demandant et redemandant à Moscou des « suppléments », tant et si bien que les « objectifs initiaux » sont, au cours des seize mois que dure l’opération (au lieu des quatre mois initialement prévus) multipliés par deux en ce qui concerne les « individus à réprimer en 2e catégorie » et par cinq pour les « individus à réprimer en Ière catégorie ». Au total, d’août 1937 à novembre 1938, 767 000 personnes sont condamnées dans le cadre de la seule « l’opération 00447 », dont 387 000 sont fusillées. (Sources : Mark Junge, Rolf Binner, Kak terror stal bolshim, Moskva, Airo-XX, 2003 ; Nicolas Werth, « Repenser la Grande Terreur », Le Débat, n°122, novembre-décembre 2002, p. 118-140).

25 juillet 1937 : Ordre opérationnel secret du NKVD n° 00439 (« Opération allemande »)

Cette opération a pour but d’éliminer tous les « agents et espions allemands », notamment « ceux infiltrés dans les usines militaires ». En réalité, elle vise tout particulièrement les citoyens soviétiques d’origine allemande, les émigrés allemands en URSS (y compris les émigrés politiques communistes), ainsi que toute personne ayant (ou ayant eu) un lien, aussi ténu fût-il, professionnel ou familial avec l’Allemagne, pays considéré comme particulièrement hostile à l’URSS. Au cours des seize mois que dura « l’opération allemande », 55 000 personnes furent arrêtées et condamnées, dont 42 000 à la peine de mort. (Source : N.Oxotin, A.Roginskii, « Iz istorii nemetskoi operatsii NKVD 1937-1938 », in I.L.Scerbakova (dir), Nakazannyi narod, Moskva, Zvenia, 1999 ).

11 août 1937 : Ordre opérationnel secret du NKVD n° 00485 (« Opération polonaise »)

Cette opération a pour but d’éliminer tous les agents d’une mythique « Organisation militaire polonaise » supposée mener des « actions d’espionnage et de sabotage » en URSS. En réalité, elle vise tout particulièrement les citoyens soviétiques d’origine polonaise, les émigrés polonais en URSS (y compris les émigrés politiques communistes) ainsi que toute personne ayant (ou ayant eu) un contact, aussi ténu fût-il, professionnel, familial ou tout simplement de proximité géographique (les habitants des régions frontalières étaient particulièrement vulnérables) avec la Pologne, pays considéré comme particulièrement hostile à l’URSS. Au cours des seize mois que dura « l’opération polonaise », 140 000 personnes furent arrêtées et condamnées, dont 111 000 à la peine de mort. (Source : N.V. Petrov, A.B. Roginskii, « Polskaia operatsia NKVD 1937-1938 », in A.E. Gurianov (dir), Repressii protiv Poliakov i Polskix grazdan, Moskva, Zvenia, 1997).

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15 août 1937 : Ordre opérationnel secret du NKVD n°00486 « Sur la répression des épouses des traîtres à la Patrie et la prise en charge de leurs enfants ».

Parmi les nombreuses « opérations de masse » de la « Grande Terreur », cette opération retient l’attention par le fait qu’elle cible non pas les individus soupçonnés de crimes contre-révolutionnaires, mais les membres de leur famille. Jusqu’alors, le principe de la responsabilité collective engageant tous les membres d’une famille avait été appliqué lors des expropriations-déportations mises en oeuvre lors de la « dékoulakisation », au moment des expulsions de certains groupes sociaux des villes « à régime spécial », puis, à partir de 1935, dans le cadre des opérations ciblées de déportation de minorités des zones frontalières. En août 1937, un pas supplémentaire est franchi dans le principe de la responsabilité collective, appliquée désormais à certaines catégories de personnes condamnées par une juridiction d’exception. Il s’agit, au départ, des membres de la nomenklatura communiste (responsables du Parti, officiers de l’Armée rouge, cadres de l’économie, hauts fonctionnaires et « spécialistes ») jugés, pour la plupart d’entre eux, par le Collège militaire de la Cour suprême ou par des tribunaux spéciaux, et condamnés comme « traîtres à la Patrie », ou « membres d’organisations d’espionnage et de sabotage trotsko-droitières ». Leurs épouses « ou concubines » – sauf si elles avaient dénoncé leur conjoint – devaient être condamnées à une peine de cinq à huit ans de camp, en fonction de leur degré de « dangerosité sociale » ; quant à leurs enfants, ils étaient placés dans des orphelinats éloignés de leur lieu de domicile. Ces mesures, en réalité, furent appliquées à des catégories de condamnés beaucoup plus vastes que celles prévues dans l’ordre n°00486 : une partie des personnes condamnées dans le cadre des « opérations nationales » virent également leurs proches, épouses et enfants, arrêtés et condamnés. Au total, près de 40 000 « épouses » furent arrêtées et condamnées, et une vingtaine de milliers d’enfants de « parents réprimés » placés dans des orphelinats. (Source : Nicolas Werth, Les opérations de masse de la Grande Terreur, Bulletin de l’IHTP n°87 (2006), p. 132-136).

20 septembre 1937 : Ordre opérationnel secret du NKVD n°00593 « Sur l’opération de répression des anciens fonctionnaires des chemins de fer de Chine orientale ».

Cette troisième « opération nationale » a pour cible un autre groupe suspect d’entretenir des liens avec une Puissance étrangère ennemie, le Japon. Il s’agissait des « Harbiniens », ex-employés et cheminots de la Compagnie des chemins de fer de Chine orientale, basée à Harbin, et qui, après la cession de la ligne au Japon, avaient été rapatriés, comme citoyens soviétiques, en URSS. Les Harbiniens étaient accusés « d’activités terroristes et diversionnistes commanditées par les services secrets japonais ». Au total, 33 108 personnes furent condamnées dans le cadre de cette opération, dont 21 200 furent exécutées. (Source : Leningradskii Martirolog, 1937-1938, St.Peterburg, 1998, vol. III, p. 583-585 ; Nicolas Werth, Les opérations …, op.cit, p. 124-126).

30 novembre 1937 : Circulaire secrète du NKVD n° 49990 (« opération lettone »)

Cette quatrième « opération nationale » vise tout particulièrement les citoyens soviétiques d’origine lettone, les émigrés lettons en URSS (notamment les émigrés politiques) accusés d’espionnage au profit de la Lettonie, État jugé hostile à l’URSS. Dans le cadre de cette opération, entre décembre 1937 et novembre 1938, 22 360 personnes furent condamnées, dont 16 573 à la peine de mort. (Source : N.Okhotin, A.Roginskii, 30 Oktiabria, 2000, n°4, p. 5-6).

L’extrême hétérogénéité des victimes de la Grande Terreur rend difficile la qualification de ce crime unique dans sa « catégorie » – 800 000 personnes exécutées d’une balle dans la nuque, à l’issue d’une parodie de justice, en l’espace de seize mois – soit 50 000 exécutions par mois, ou 1 700 par jour durant près de 500 jours. Nous nous en tiendrons donc à une qualification « minimale »- celle de « crime de masse » perpétré par l’État stalinien à l’encontre d’un pour cent environ de l’ensemble de sa population adulte.

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DÉPORTATIONS DE POPULATIONS ET EXÉCUTIONS DE MASSE DANS LES TERRITOIRES ANNEXÉS PAR L’URSS À LA SUITE DU PACTE GERMANO-SOVIÉTIQUE DU 23 AOÛT 1939

Pour la première fois, des pratiques répressives largement expérimentées sur la société soviétique sont exportées. Leur brutalité traumatise profondément les sociétés polonaise, lettone, lituanienne, estonienne soumises à la soviétisation ; mais pour les autorités d’occupation, les politiques mises en oeuvre ne font que dupliquer, de manière presque routinière, des mesures couramment appliquées à l’égard de citoyens soviétiques, sans qu’un seuil de violence supplémentaire soit franchi. Trois formes principales de répression marquent l’occupation-annexion soviétique : les arrestations massives, suivies de condamnations à des peines de camp (environ 110 000 pour la Pologne occupée) ; les déportations collectives (320 000 Polonais, 80 000 Baltes et Moldaves), les déportés étant assimilés à des « déplacés spéciaux » et soumis au régime d’assignation et de travail régissant cette catégorie de citoyens soviétiques; les exécutions de masse des élites polonaises (plus de 25 000).

4 décembre 1939 : Résolution du Politburo sur la déportation des « colons et forestiers militaires polonais ».

10-14 février 1940 : Déportation de 27 000 familles (139 600 personnes) vers 24 régions d’URSS (d’Arkhangelsk à Irkoutsk). Cette déportation frappe en réalité un contingent beaucoup plus large que la seule catégorie des « colons et forestiers militaires » (personnes ayant reçu de l’État polonais des terres dans les districts frontaliers de l’URSS en récompense de leurs états de service durant la guerre soviéto-polonaise de 1920) : propriétaires fonciers, industriels, fonctionnaires polonais et autres « ennemis de classe ». (Source : A.Gurianov, « Polskie spetzpereselentsy v SSSR v 1940-1941 g, in Repressii protiv Poliakov i pol’skix grazdan, Moskva, Zvenia, 1997, p ; 114-136).

5 mars 1940 : Lettre de L.Beria, Commissaire du peuple à l’Intérieur de l’URSS, à Staline proposant l’exécution de 25 700 anciens officiers, hauts fonctionnaires, grands propriétaires terriens, industriels, officiers de police et autres « membres d’organisations contre-révolutionnaires polonaises ».

Avril 1940 : Exécution de 25 700 Polonais, officiers, hauts fonctionnaires, représentants des élites militaires, civiles et économiques du pays, incarcérés dans les trois « camps spéciaux » de Kozielsk, Ostachkov et Starobielsk. Les exécutions ont lieu sur plusieurs sites, dont Katyn.

(Source : R.G.Pikhoia, V.P.Kozlov, dir, Katyn, Moskva, Fond Demokratia, 1997).

2 avril 1940 : Résolution du Politburo sur la déportation de trois catégories de Polonais : membres des familles des officiers, hauts fonctionnaires, industriels, grands propriétaires terriens déjà arrêtés ; prostituées ; réfugiés de la partie occidentale de la Pologne (sous occupation allemande) passés à l’est, dans la zone d’occupation soviétique.

12-13 avril 1940 : Déportation de 61 000 personnes appartenant aux trois « catégories » définies par la résolution du Politburo du 2 avril 1940 vers le Kazakhstan.

(Source : A.Gurianov, art cit).

28-29 juin 1940 : Déportation vers les « villages spéciaux » de Sibérie de 75 000 réfugiés polonais de la zone d’occupation allemande passés à l’est, dans la zone d’occupation soviétique.

16 mai 1941 : Résolution du Politburo sur la déportation de neuf catégories de personnes (membres des partis contre-révolutionnaires ; ex-officiers de police, hauts fonctionnaires, juges et procureurs ; propriétaires fonciers, industriels, commerçants en gros ; ex-officiers ; éléments criminels ; prostituées ; membres des familles des catégories 2 à 4 ; membres des familles de la catégorie 1 ; réfugiés polonais de la zone d’occupation allemande) de la zone d’occupation soviétique en Pologne, des trois pays baltes incorporés à l’URSS en 1940 et de la Moldavie annexée à l’URSS en août 1940.

22 mai- 20 juin 1941 : Mise en oeuvre de la 4e grande opération de déportation, prévue par la résolution du Politburo du 16 mai 1941. En un mois, 107 000 personnes sont arrêtées, dont 86 000 sont déportées vers la Sibérie et le Kazakhstan, les autres étant envoyées en camp de travail du Goulag. (Source : A.Gurianov, art.cit )

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LES DÉPORTATIONS ETHNIQUES TOTALES DE « PEUPLES PUNIS » DURANT LA « GRANDE GUERRE PATRIOTIQUE »

Au cours de la « Grande guerre patriotique », plus de deux millions de citoyens soviétiques appartenant à des minorités ethniques accusées soit de constituer un vivier d’agents potentiels de l’envahisseur nazi (citoyens soviétiques d’origine allemande), soit d’avoir « collaboré avec l’occupant »(Tchétchènes, Ingouches, Kalmouks, Balkars, Karatchaïs, Tatars de Crimée), sont déportés et assignés à résidence avec le statut de « déplacés spéciaux » dans un certain nombre de régions inhospitalières du pays. Par rapport aux précédentes déportations, les déportations totales des années 1941-1944 présentent un certain nombre de caractères spécifiques, le plus remarquable étant qu’elles visent à « l’excision ethno-historique » (Francine Hirsch) de nationalités entières, déclarées collectivement « ennemies du régime soviétique ». La totalité des membres de l’ethnie punie est soumise à diverses discriminations, qui vont de la déportation au travail forcé ; toutes les structures administratives de la région ou de la république autonome sont abolies ; bref, la nationalité « punie », exclue de la « grande famille des nationalités socialistes soviétiques » cesse tout simplement d’exister. Un décret du Praesidium du Soviet suprême de février 1948 précise que les « peuples punis » sont déportés « à perpétuité ».

Fin août 1941-mars 1942 : Déportation des citoyens soviétiques d’origine allemande.

28 août 1941 : Décret du Praesidium du Soviet suprême sur la déportation collective « préventive » des Allemands de la Volga (RA des Allemands de la Volga, régions de Stalingrad et de Saratov).

Ce décret est suivi de quatorze autres décrets s’échelonnant entre le 30 août 1941 et le 20 mars 1942, portant sur la déportation des citoyens soviétiques d’origine allemande des régions de Moscou, Leningrad, Toula, Gorki, Rostov, Zaporojie, Krasnodar, Ordjonikidze, Voronej, Vorochilovgrad, Odessa, de Crimée, des RSS de Géorgie et d’Arménie.

Au 25 décembre 1941, 894 600 personnes ont déjà été déportées. Fin mars 1942, le bilan dressé par le Département des peuplements spéciaux du Goulag fait état de 1 209 430 déportés, soit 82% de la population soviétique d’origine allemande recensée en 1939. Les principaux lieux de déportation sont le Kazakhstan, la Sibérie et le Grand Nord (Vorkouta). Pour assurer un « nettoyage » aussi complet que possible, le NKVD arrête plusieurs dizaines de milliers de soldats et d’officiers d’origine allemande servant dans l’armée soviétique. Environ 30% des déportés, les plus aptes au travail (les hommes de 17 à 50 ans, mais aussi, à partir d’octobre 1942, les femmes de 16 à 45 ans) sont versés dans des bataillons de « l’Armée du travail », où les conditions de vie et de travail s’apparentent à celles des camps du Goulag. Les principaux sites de production où est exploitée cette main d’oeuvre forcée sont les mines de Vorkouta, de Karaganda et du Kouzbass. (Sources :P.Polian, op.cit, p. 102-115 ; I.L. Scherbakova, dir, Nakazannyi narod, Moskva, Zvenia, 1999, p.118-127 ).

Octobre 1943 : Déportation des Karatchaïs.

12 octobre 1943 : Décret du Praesidium du Soviet Suprême sur la déportation collective des Karatchaïs pour « collaboration avec l’occupant nazi » et sur la « liquidation de la Région autonome des Karatchaïs.

Entre le 20 et le 27 octobre : 68 327 personnes sont déportées par convoi ferroviaire vers le Kazakhstan et la Kirghizie.

(Source : P.Polian, op.cit, p. 118-119).

Décembre 1943 : Déportation des Kalmouks.

27 décembre 1943 : Décret du Praesidium du Soviet Suprême sur la déportation collective des Kalmouks pour « collaboration avec l’occupant nazi » et sur la « liquidation de la République autonome socialiste de Kalmoukie ».

Entre le 28 et le 31 décembre : 93 139 personnes (26 359 familles) sont déportées par 46 convois ferroviaires vers l’Altaï, les régions de Krasnoiarsk, Omsk et Novossibirsk (Sibérie).

(Sources : P.Polian, op.cit, p. 120-121 ; N.Werth, S.Mironenko, Massovye repressii v SSSR, Istoria Stalinskogo Gulaga, Moscou, Rosspen, 2004, tome I, p. 477-481).

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Février 1944 : Déportation des Tchétchènes et des Ingouches.

Du 23 au 28 février, 521 247 personnes sont déportées par 194 convois ferroviaires vers le Kazakhstan. 119 000 hommes des troupes spéciales du NKVD ont été mobilisés pour cette opération d’ampleur exceptionnelle. (Source : N.Bugaï, L.Beria-I.Stalinu, Soglasno Vasemu Ukazaniju, Moskva, AIRO-XX, 1995, p. 102sq ; N.Werth, S.Mironenko, op.cit, p. 486-494).

Le 27 février, dans l’aoul Khaibax (district Galancjoiskii), les troupes commandées par le Général Gvichiani, bloquées à cause du mauvais temps et incapables de livrer leur chargement humain dans les délais impartis au point de rassemblement ferroviaire, enferment plusieurs centaines de personnes dans une écurie de kolkhoze à laquelle ils mettent le feu. (Source : P.Polian, op.cit, p. 123).

7 mars 1944 : Décret du Praesidium du Soviet Suprême sur la déportation collective des Tchétchènes et des Ingouches pour « collaboration avec l’occupant nazi » et sur la « liquidation de la République autonome socialiste de Tchétchénie-Ingouchie ».

Mars 1944 : Déportation des Balkars.

5 mars 1944 : Décret du Comité d’État à la Défense sur la déportation collective des Balkars pour « collaboration avec l’occupant nazi ».

9-11 mars 1944 : Déportation de 37 103 personnes de la République Autonome de Kabardino-Balkarie vers le Kazakhstan et la Kirghizie, en 23 convois ferroviaires.

8 avril : Décret du Praesidium du Soviet Suprême sur la « liquidation de la République autonome socialiste de Kabardino-Balkarie ». (Sources : N.Werth, S.Mironenko, op.cit, p. 481-485).

Mai 1944 : Déportation des Tatars de Crimée.

13 avril 1944 : Ordre opérationnel n°00419/00137 du NKVD/NKGB de l’URSS « Sur les mesures pour nettoyer la RSSA de Crimée des éléments antisoviétiques ».

11 mai 1944 : Décret du Comité d’État à la Défense sur la déportation collective des Tatars de Crimée pour « collaboration avec l’occupant nazi ».

18-20 mai 1944 : Déportation de 180 014 Tatars de Crimée vers l’Ouzbekistan. (Source : N.Bougaï, Deportatsia narodov Kryma, Moskva, 1997, p. 45-64).

Juin 1944 : Déportation des Bulgares, Grecs et Arméniens de Crimée.

2 juin 1944 : Décret du Comité d’État à la Défense sur la déportation des minorités bulgares, grecques et arméniennes de Crimée pour « collaboration avec l’occupant ».

24-28 juin 1944 : Déportation de 37 083 Grecs, Bulgares et Arméniens de Crimée vers les régions de Kemerovo, Sverdlovsk et la RSSA de Bachkirie. (Sources :A.Gonov, Narody v eselonax, Moskva, 1999 ; N.Werth, S.Mironenko, op.cit, p. 494-505 ).

Novembre 1944 : Déportation des Turcs Meskhètes, Kurdes et Khemchines des districts frontaliers de la RSS de Géorgie.

20 septembre 1944 : Décret du Comité d’État à la Défense sur la déportation des Turcs Meskhètes, Kurdes et Khemchines des districts frontaliers de la RSS de Géorgie.

15 au 25 novembre : Déportation de 91 095 personnes vers le Kazakhstan, l’Ouzbékistan et la Kirghizie.

(Sources : A.Gonov, op.cit ; N.Bougaï, op.cit ; N.Werth, S.Mironenko, op.cit, p. 505-512).

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LES DÉPORTATIONS DE MASSE DANS LE CADRE DE LA RESOVIÉTISATION DES PAYS BALTES, DE L’UKRAINE OCCIDENTALE ET DE LA MOLDAVIE (1947-1949)**

La résoviétisation des territoires annexés par l’URSS en 1939-1940 à la suite du pacte germano-soviétique, puis occupés par l’Allemagne à partir de juillet 1941, s’accompagne, à partir de l’automne 1944 d’une véritable guerre de pacification face à la résistance opposée par les guerrillas nationalistes baltes et ukrainienne. Les affrontements entre les unités spéciales du Ministère de l’Intérieur (« bataillons d’extermination ») et les « partisans » (appelés « bandits » par les autorités soviétiques) sont d’une extrême violence et se prolongent, dans certaines régions, jusqu’à la fin des années 1940, voire jusqu’au début des années 1950. Dans deux mémorandums secrets adressés le 26 mai 1953, quelques semaines après la mort de Staline, par Lavrentii Beria, au Praesidium du Comité central, le chef de la Sécurité d’État dressait le bilan suivant de la « guerre » menée en Ukraine occidentale de 1944 à 1952 : 153 000 tués dans les affrontements armés, 134 000 condamnés à une peine de camp, 203 000 déportés. En Lituanie, le bilan s’élève à 50 000 tués, 70 000 condamnés, 150 000 déportés. (Source : Lavrentii Beria.Dokumenty, Moskva, MFD, 1999, p. 46-49). Comme dans toute guerre de pacification de ce type, il est à l’évidence impossible de dresser une liste des massacres, exactions, tortures dont ont été victimes les populations civiles prises entre deux feux. On se bornera ici à citer les principales opérations centralisées de répression prises à l’encontre des populations civiles, sous la forme de déportations de masse.

10 septembre 1947 : Résolution du Conseil des Ministres de l’URSS sur la « déportation des membres des familles de partisans de l’OUN (Organisation des Nationalistes Ukrainiens) et des bandits ukrainiens ».

Octobre 1947-janvier 1948 : Environ 40 000 « membres des familles de partisans de l’OUN » sont déportés vers les régions de Karaganda (Kazakhstan), Kemerovo, Tioumen, Kirov, Sverdlovsk, Tcheliabinsk.

21 février 1948 : Résolution du Conseil des Ministres de l’URSS sur la « déportation des membres des familles des bandits et des nationalistes, ainsi que de leurs complices et des koulaks de la RSS de Lituanie».

22-23 mai 1948 : Opération « Printemps » : arrestation et déportation de 36 932 hommes, femmes et enfants « membres des familles de bandits, nationalistes et koulaks » vers la Sibérie (régions de Krasnoiarsk, Irkoutsk, Tomsk). Dans les semaines suivantes, plus de 7 000 autres personnes sont déportées. (Sources : V. Zemskov, op.cit, p. 155 ; N. Bougaï, op.cit, p. 188 sq ; N. Werth, S. Mironenko, op.cit, p. 513-514).

4 octobre 1948 : Résolution du Conseil des Ministres de l’URSS sur la « déportation des membres des familles de partisans de l’OUN et des bandits ukrainiens ».

Octobre 1948-fin 1949 : Environ 50 000 « membres des familles de partisans de l’OUN » sont déportés vers le Kazakhstan, l’Oural et la Sibérie. Au début de 1953, le contingent des « membres des familles de l’OUN » inscrit dans les statistiques du Département des peuplements spéciaux du Goulag compte plus de 175 000 personnes. (Source: V. Zemskov, op.cit, p. 155, 226).

29 janvier 1949 : Résolution du Conseil des Ministres de l’URSS sur la « déportation des koulaks et leurs familles, ainsi que des membres des familles de bandits et nationalistes des RSS de Lituanie, Lettonie et Estonie ».

25 mars-10 mai 1949 : Déportation de 94 779 personnes (30 630 familles) des RSS de Lituanie, Lettonie et Estonie vers les régions de Krasnoïarsk, Irkoutsk, Tomsk et la RSSA de Bouriatie-Mongolie. (Source : N.Werth, S.Mironenko,dir, Massovye repressii v SSSR, Istoria Stalinskogo Gulaga, vol 1, Moskva, Rosspen, p. 517-521).

6 avril 1949 : Résolution du Conseil des Ministres de l’URSS sur la « déportation de la RSS de Moldavie des koulaks, ex-propriétaires fonciers, ex-commerçants en gros, collaborateurs, membres d’organisations fascistes et de sectes ».

6-7 juillet 1949 : Déportation de 40 850 personnes (11 280 familles) de la RSS de Moldavie vers les régions de Kourgansk, Tioumen, Irkoutsk et de l’Altaï. (Source : N. Werth, S. Mironenko, dir, op.cit, p. 524-528 ; P. Polian, Ne po svoiei vole, Moscou, OGI, 2001, p. 133-135).

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DÉPORTATIONS DE MINORITÉS NATIONALES DANS LE CADRE DES OPÉRATIONS DE « NETTOYAGE » ET DE « SÉCURISATION » DES FRONTIÈRES DE L’URSS

Parallèlement aux déportations « punitives » de membres des familles des opposants à la soviétisation des pays baltes, de l’Ukraine occidentale et de la Moldavie, se poursuivent, en 1949, des opérations de « nettoyage » et de « sécurisation » des zones frontalières de l’URSS, notamment le long des frontières du Caucase. Ces déportations s’inscrivent dans une politique initiée au milieu des années 1930 et prolongée en 1944-1945.

29 mai 1949 : Résolution du Conseil des Ministres de l’URSS sur la « déportation des Turcs, Grecs et des ex-membres du parti Dachnak des RSS de Géorgie, d’Arménie et d’Azerbaïdjan, ainsi que du littoral de la Mer Noire ».

14-18 juin 1949 : Déportation de 57 680 personnes des RSS de Géorgie, d’Arménie et d’Azerbaïjan vers le Kazakhstan et la Sibérie. (Source : N.Werth, S.Mironenko, dir, op.cit, p. 533-539).

Dernières déportations « d’éléments hostiles » et « socialement étrangers » (1951-1952)

23 janvier 1951 : Résolution du Conseil des Ministres de l’URSS sur la « déportation des koulaks des régions de Volhynie, Drogobych, Rovno, Lvov, Stanislavl, Ternopol, Tchernovitsy de la RSS d’Ukraine.

Février 1951 : Déportation de 8 461 « koulaks » d’Ukraine occidentale vers la région de Krasnoiarsk (Sibérie).

3 mars 1951 : Résolution du Conseil des Ministres de l’URSS sur la « déportation des membres de la secte des Témoins de Jehovah des régions occidentales des RSS d’Ukraine et de Biélorussie, ainsi que des RSS de Moldavie, Lettonie, Lituanie et Estonie ».

Mars-avril 1951 : Déportation de 9 825 Témoins de Jehovah vers les régions d’Irkoutsk et d’Omsk (Sibérie).

29 novembre 1951 : Résolution du Conseil des Ministres de l’URSS sur la « déportation des éléments hostiles de la RSS de Géorgie ».

Décembre 1951-février 1952 : Déportation de 6 300 personnes (« rapatriés, membres des familles d’émigrés, collaborateurs, ex-prisonniers de guerre ») vers le Kazakhstan méridional.

(Sources : Pavel Polian, Ne po svoie vole, Moscou, OGI, 2001, p. 137-143 ; N.F.Bugaï, L.Beria-I.Stalinu : »Soglasno Vasemu ukazaniju », Moscou, AIRO-XX, 1995, p. 241-249).

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La Gifle

C’était le titre d’un film dans lequel jouaient Isabelle Adjani et Lino Ventura. Aujourd’hui, ce n’est plus du cinéma mais du réel.

Pour Marlène Schiappa, la belle napolitaine dodue, écrivaine à ses heures de petits livres érotico-pornographiques de haute valeur intellectuelle et morale, quand Macron est giflé, c’est toute la France qui l’est aussi.

Non Marlène, ce n’est que le petit nombre de ses électeurs, et encore, qui est accablé par cette gifle. A part ceux-là, toute la France rigole de ce petit incident.

Nombreux sont les français qui seraient heureux de pouvoir baffer Macron mais qui n’auront jamais cette possibilité. Ou même de l’entarter à la crème Chantilly, ce qui est encore plus spectaculaire.

Mais à y regarder de plus près, ce geste de la main paraissait plutôt superficiel.

Résultat, 6 mois de prison et 75 000 €uros d’amendes pour le coupable de ce geste malheureux. Pas de rappel à la loi, ni de bracelet électronique pour lui. Avec incarcération immédiate comme s’il était un criminel.

Par contre, les voyous de la diversité peuvent blesser gravement des flics et même, chercher à les tuer, ils ne récolteront que des réprimandes de la justice. Ce qui est une honte !

Jugé pour avoir ridiculisé la fonction présidentielle. Mais c’est pourtant Macron, qui s’est le premier chargé de désacraliser cette haute et respectable fonction.

Faut-il rappeler les faits ? Déjà depuis le tout début, et son contact « rapproché » avec deux délinquants dépoitraillés à St Martin. Ensuite, son invitation de brailleurs d’insanités, sur les marches de l’Elysée. Sans compter ses fréquentations douteuses ou inadaptées comme celles des youtubers Mc Fly et Carlito.

Sans parler des insultes qui s’adressent à des gens du peuple : Alcooliques, illettrés, moins que rien. Ou à la France (qui d’après lui) est un pays qui a fait beaucoup de mal, avec  la colonisation qui est un crime contre l’humanité à Alger etc…

Zemmour dit avec justesse: « Je condamne la gifle, mais il a lui-même désacralisé la fonction » Il dit aussi, « L’extrême droite n’existe pas, il y a la France et les ennemis de la France ». Et puis, quand on minimise la violence dans la société il est difficile de voir de la violence dans cette petite claque. Tout une tempête dans un verre d’eau !

On remarque beaucoup d’hypocrisie dans les commentaires. Et comme d’habitude, l’occasion était trop belle d’accuser les auteurs de l’incident d’appartenir à l’extrême droite. On aurait retrouvé chez l’un d’eux, un exemplaire de Mein Kampf, comme si ce livre, en vente libre, n’était réservé qu’aux admirateurs d’Adolf Hitler.

Ces trois jeunes, si rapidement jugés en comparution immédiate voulaient seulement, au départ, ne questionner Macron que sur sa politique. Selon leur version, la gifle n’était pas au programme.

Qu’ils n’aimaient pas ce personnage arrogant et prétentieux est sans doute évident, mais un geste impulsif et irréfléchi mérite quand même des circonstances atténuantes. Du moins je l’espère …

Ce n’est pas De Gaulle, attaqué au fusil mitrailleur au Petit Clamart.

Après tout, un homme politique ne risque que ce qui est à la dimension de son personnage.

Personne n’aurait eu l’idée, à l’époque, de gifler De Gaulle. Certains pouvaient le détester, mais il était respecté.

« La bêtise, c’est de se comporter de la même manière et d’attendre un résultat différent »  (Albert Einstein).

Onyx